« si nos affirmations à propos de Jésus-Christ sont vraies, alors les évangéliques devraient compter parmi les partisans les plus engagés, les plus ouverts d’esprit et les plus sérieux d’une approche qui encourage la rigueur intellectuelle et l’approfondissement de la connaissance humaine. » (p.8).
Les éditions HET-PRO frappent un grand coup en mettant à disposition du lectorat francophone un ouvrage exigeant, mais fondamental de la réflexion récente sur l’articulation de la vie intellectuelle et de la vie spirituelle d’un point de vue évangélique, un ouvrage qui dépasse les slogans et plonge au cœur des convictions théologiques. L’auteur, spécialiste de l’histoire du monde évangélique et rendu célèbre par son « scandale de la pensée évangélique » paru en 1994 (le scandale était qu’il n’y avait guère de « pensée évangélique… »), présente un argumentaire fin, passionné et passionnant pour une vie intellectuelle passionnée par la gloire du Dieu incarné en Jésus-Christ,
On trouvera dans ce petit ouvrage un plaidoyer pour la pertinence des crédos de l’Histoire de l’Église — et particulièrement celui de Calcédoine qui consacre la doctrine des deux natures de Christ — pour envisager notre rôle et mission dans le monde. La confession du mystère de la double nature de Christ, lequel est à l’œuvre dans la création et la rédemption nous engage à considérer l’incarnation comme un principe profondément valorisant de la création et donc de son étude honnête et courageuse : « reconnaître la réalité matérielle de l’incarnation revient à discerner la dignité particulière du monde matériel lui-même » (p.58). Cette perspective ouvre des horizons fascinants pour l’engagement chrétien dans tous les domaines de la connaissance, des sciences naturelles aux arts en passant par les sciences humaines. L’ouvrage aborde également la question cruciale de l’objectivité et de la subjectivité dans la recherche de la vérité. Noll propose un rééquilibrage, affirmant que « Dieu est présenté dans les Écritures à la fois comme un Dieu personnel et comme la source de toute vérité » (p.113). Cette vision permet de dépasser les fausses dichotomies (universel/objectif-particulier/subjectif) qui si souvent sont à la racine de débats épistémologiques houleux dans la société et parfois même dans nos églises.
Enfin, Noll relève la place du principe de la substitution pénale dans une juste appréhension du monde, et donc de la recherche intellectuelle (contre certains réductionnismes). La seconde partie du livre explore les conséquences concrètes de l’argumentaire pour l’étude de l’Histoire, des sciences naturelles et des textes bibliques.
Un ouvrage désormais incontournable pour tout croyant désireux de vivre sa foi de manière intellectuellement engagée et rigoureuse. Il offre des perspectives rafraîchissantes sur la manière dont notre compréhension du Christ peut informer et transformer notre approche de la connaissance et de la recherche.
Timothée Joset